Théories du complot

Les théories du complot ont toujours existé. Mais avec l’avènement d’internet et de la parole à tous les crétins, elles fleurissent tout comme fleurissent les experts en tout et n’importe quoi, et qui donnent leur avis sur tout et n’importe quoi, justement.

Je suis un expert

Ce qu’il y a de bien avec le titre d’expert, c’est que tout le monde peut s’en réclamer. Moi je suis un expert des théories du complot. Idem pour tout événement historique ou dramatique, pour tout concept plus ou moins fumeux : les historiens sont donc relégués au rang des inutiles, tout comme les magistrats, les enquêteurs de police, les journalistes, les scientifiques, etc.

Pourquoi ça marche

De mémoire, les théories du complot ont d’abord vu le jour aux Etats-Unis. Sans être un monopole, la liberté d’expression est culturellement plus ancrée dans les comportements qu’ailleurs.

Il y a une explication à cela :

[Aux Etats-Unis,] le Premier Amendement de leur constitution garantit la liberté d’expression. Légalement, rien n’empêche personne de faire de la « fake news », de la théorie du complot… contrairement à la France où la liberté d’expression est encadrée1.

Bon sens et intelligence…

…sont deux choses bien différentes. Je dis souvent en sécurité informatique qu’avec du bon sens, on arrive à éviter une grande partie des menaces qui planent sur nous. Mais faire preuve de bon sens n’est pas un dogme, il faut aussi réfléchir. Les sens peuvent nous guider, mais ils sont parfois (très) trompeurs.

La véritable vérité vraie sur les fausses nouvelles

Une des caractéristiques principales des théories du complot est le refus des faits, preuves et explications officielles : il y a une révulsion quasi-maladive face à tout information émanant d’un service ou d’une autorité officielle. Le prédicat de départ consiste à dire que l’information officielle est fausse, et que la vérité est différente.

Différencier ce qui est vrai de ce qui est faux demande non seulement du bon sens, mais aussi de l’éduction et de l’intelligence. Par contre, affirmer quelque chose de faux ne demande aucun effort particulier. Si on conteste une version officielle, il suffit de dire que c’est faux. Soutenir une contre-vérité est facile puisqu’on n’a pas à la prouver ; il n’y a pas à prouver ou argumenter quoi que ce soit, il suffit de soutenir ce qui nous arrange.

A l’inverse, pour tenter de faire admettre qu’un fait est véridique, il faut accumuler les preuves, les explications, les sources, et parfois expliquer que le bon sens peut nous induire en erreur. J’ai vu un internaute passer des mois à expliquer pourquoi l’effondrement des tours du Word Trade Center n’était pas dû à une démolition contrôlée alors qu’il suffit d’une bribe d’image ou de vidéo pour affirmer le contraire.

Entretenir et crédibiliser le mensonge

Une autre technique souvent utilisée par tout type de manipulateur est de mélanger le vrai et le faux, afin de renforcer la crédibilité apparente d’un mensonge.

Propagation

Un des phénomènes les plus intrigants dans le cas des fausses nouvelles et autres théories du complot est leur incroyable rapidité de propagation. Certains ont même creusé le sujet et trouvé que les fausses nouvelles se diffusent plus rapidement que les vraies2, ce qui les transforment en véritables armes de manipulation. Cela se vérifie dans de nombreux algorithmes et dans la durée. En 2024, des chercheurs l’ont encore constaté chez Telegram3.

Propagande et manipulation

Un de buts des théories du complot peut être de manipuler l’opinion, dans un but idéologique, électoral, ou même tout simplement financier. Un autre objectif peut être de se rassurer en trouvant un coupable idéal, de façon simple et simpliste, car il est beaucoup moins angoissant de s’en prendre à quelqu’un ou à une organisation que de se dire qu’on ne peut rien faire que subir, comme avec le Covid ou, plus généralement, avec tout virus qui peut très bien servir à toute théorie complotiste basé sur la maîtrise de l’armement chimique et bactériologique par la nation que vous souhaitez désigner comme coupable (Russie, Chine, Etats-Unis, France, Vatican, etc.).

On peut écrire des livres sur la manipulation et le complotisme, mais la base de la mécanique reste l’absence d’esprit réellement critique, c’est-à-dire par exemple la capacité non à remettre en cause le savoir des autres mais surtout à s’interroger sur son savoir propre. Il y a bien quelques exemples ici ou là, mais tellement rares, comme ce platiste voulant prouver que la Terre était bien plate et qui a dû admettre (et surtout : réussi à admettre) qu’il avait tort4, bien que son expérience lui ait coûté cher (au sens propre).

Sources

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